Une pièce où se pose la question des liens entre l’art et le pouvoir, la politique et les artistes, et plus largement, de nos propres existences avec le compromis…
“Montée des extrémismes, banalisation des discours racistes, crise économique, replis identitaires, autoritarisme, appels répétés à la grandeur et à la pureté nationale, mépris du débat d’idées et haine de la démocratie, ressentiment, hargne et colère, attrait obscur pour la catastrophe… L’Europe actuelle se retrouve fortement hantée par le spectre de son histoire fasciste. La comparaison régulièrement faite entre le contexte actuel et l’Allemagne des années 30, a de quoi nous interpeller.
Si la séquence historique que nous traversons ne peut être calquée sur celle de la République de Weimar – l’Histoire bégaie mais ne se répète jamais à l’identique –, si la période qui s’ouvre ne s’inscrit pas dans les mêmes enjeux politiques, cette époque du début des années 30, minée par le dégout d’elle-même, hantée par la destruction, le désir de vengeance et la grande catastrophe, impuissante à empêcher l’horreur d’advenir, pourrait peut-être nous permettre de questionner la nôtre.
Quels rapports entretenons-nous aujourd’hui avec la catastrophe, avec le fascisme, avec l’indifférence ou avec, comme l’évoque l’historien Patrick Boucheron, notre propre fascination pour la tyrannie ?
En retraçant l’itinéraire d’un artiste avide de gloire dans une société allemande gangrénée puis dévorée par le nazisme, en s’inspirant de la figure du grand acteur allemand Gustaf Grüdgens qu’il a très bien connu, Klaus Mann dans son roman Mephisto nous plonge au cœur de la question des liens qu’entretiennent l’art et le pouvoir, le théâtre et l’État, la politique et les artistes, et plus largement, nos propres existences avec le compromis.
S’inspirer de ce roman, de la figure ambigüe de Gustaf Grundgens, des combats que Klaus Mann a mené toute sa vie jusqu’à l’épuisement et le suicide, de ses articles dans Contre la Barbarie où il raconte ses entrevues avec les artistes ayant continué à travailler sous le Troisième Reich, nous conduit immanquablement à nous interroger sur l’époque contemporaine, sur les liens qu’entretiennent aujourd’hui l’art et la politique, sur nos propres points aveugles et sur la figure de l’artiste prise souvent dans une schizophrénie entre amour revendiquée de la justice et de l’humanité et course à la gloire effrénée dans l’ultra concurrence capitalisme.[…]
Mephisto {Rhapsodie} tente de déjouer les évidences, de critiquer la paresse de pensée qui nous fait parfois croire que nous ne participons pas de ce qui détruit un monde. Car il s’agit sans doute de travailler la mauvaise conscience d’un temps, d’interpeller ce pays où nous sommes, d’y évoquer le sentiment de relégation ressenti par beaucoup pour appréhender le terreau sur lequel naissent les catastrophes. Mephisto {Rhapsodie} parle aussi du doute de ce que peut le théâtre à l’heure des périls, de ce que signifie le théâtre dans un monde de la production effrénée et de l’urgence permanente, questionne la puissance ou non de ce que nous faisons, la nécessité et la vanité de ce que nous faisons, l’engagement et le sentiment d’impuissance face au bulldozer de l’Histoire qui arrive, et tente de venir interpeller les forces mêmes qui nous fondent, nos fragiles mais nécessaires résistances à ce qui nous détruit.”
– Samuel Gallet,
mai 2018
Mardi 26 mars à 20h45
L’Estive scène nationale de Foix et de l’Ariège
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